Désescalade chirurgicale dans le cancer du sein
Depuis plusieurs décennies, les chirurgiens sénologues (spécialisés dans la chirurgie du sein et notamment du cancer) ont initié une désescalade de la chirurgie. Cela consiste à limiter les gestes chirurgicaux au strict minimum et à ne conserver que les gestes prouvés utiles afin de limiter les effets secondaires.
Ganglion sentinelle et cancer du sein
L’exemple le plus connu et flagrant est la chirurgie des ganglions axillaires. En effet, en cas de cancer invasif du sein, une chirurgie des ganglions de l’aisselle est systématiquement associée. Une atteinte ganglionnaire est un facteur pronostic du cancer du sein. Cela veut dire que le fait d’avoir un ganglion axillaire malade peut impacter le risque de récidive du cancer et la survie des patientes. En cas d’atteinte axillaire, les traitements complémentaires à la chirurgie, dit adjuvants, seront alors adaptés. Ainsi une chimiothérapie ou une extension des zones de radiothérapie seront potentiellement nécessaires pour contrebalancer l’atteinte locorégionale.
Un curage axillaire était historiquement systématiquement réalisé – cela consiste à retirer tous les ganglions drainant un organe dans une zone prédéfinie. Cela entraîne des risques de complications, y compris à long terme. Le plus connu des effets secondaires étant le lymphœdème encore appelé « gros bras ». Afin de limiter ce risque, la technique du ganglion sentinelle a été développée. Cette procédure consiste à ne retirer que le premier ou les 2-3 premiers ganglions de la chaîne axillaire. Ainsi, l’information sur l’atteinte ou non des ganglions est connue ; pour autant il n’y a pas de risque d’effet secondaire grave.
Jusqu’à récemment, cette technique était réservée aux patientes n’ayant pas de ganglion envahi connu au diagnostic. Toutefois, des études internationales portant sur un grand nombre de patientes avec un long recul, ont permis de démontrer l’absence d’effet thérapeutique du curage axillaire. Ainsi, l’information est essentielle mais retirer tous les ganglions est inutile. Les examens d’imagerie tels que l’échographie, l’IRM mammaire ou le PET-TDM ont amélioré la détection des atteintes ganglionnaires, mais leur puissance n’est pas encore suffisante pour se passer d’une évaluation chirurgicale.
Les recommandations internationales et nationales ont proposé récemment de réaliser une procédure de ganglion sentinelle chez des patientes ayant une atteinte axillaire prouvée au diagnostic ayant une chirurgie en premier traitement. Toutefois, en pratique, peu d’équipes ont passé le cap de cette procédure dans cette indication et il n’y a pas à ce jour de donnée scientifique publiée française sur ce sujet. Une récente étude publiée dans le journal Current Oncology a réalisé une revue de la littérature (tour d’horizon des études existantes) : seules 2 études internationales ont porté spécifiquement sur le sujet et les résultats sont discordants : l’une étant rassurante y compris sur le long terme, l’autre ne permet pas de conclure à la sécurité de cette procédure dans cette indication. Les populations et techniques de prise en charge de ces 2 études différaient, ne permettant pas d’extrapoler ces résultats à la situation française. Il est ainsi essentiel que les équipes médicales françaises récoltent leurs données afin d’évaluer leur pratique et l’impact des nouvelles recommandations sur le pronostic des patientes.
Pour en savoir plus, l’article de Current Oncology disponible en Open Acces : https://doi.org/10.3390/curroncol30030235